Pourquoi le sport et le cyclisme comme support de promotion ?
Yvon Breton : « L’équipe cycliste est nées dans les années 90. A cette époque, les entreprises nous connaissaient bien dans nos métiers, mais moins le grand public. Nous avions une déficience en matière de visibilité et de notoriété. Nous avons réfléchi à une stratégie de communication. Et la question qui s’est posée était : quel type de communication ? Le sport est apparu comme une réponse adaptée, sur le plan financier et parce qu’il est porteur de valeurs.
D’abord la voile avant le vélo
Mais alors quel sport ? Et quel positionnement dans le sport ? J’ai une grille de tri qui est de dire : « On va investir dans les sports qui sont gratuits pour le public. » Nous voulions partager ce que le sport permet et quand c’est gratuit, cela génère plus facilement des émotions. Ce n’est pas pour rien si le Tour de France a autant de succès.
L’autre critère était de se dire : « Nous voulons associer notre nom à celui du sport ». Nous avons commencé par la voile car c’était plus accessible. Mais en 1997 nous avons a eu l’opportunité de nous associer à l’équipe voulue et créée par Casino. Comme il y a toujours eu des liens étroits entre AG2R et Casino, nous nous sommes embarqués à leurs côtés. Au départ, nous n’étions pas dans le nom de l’équipe, mais cela nous a permis de découvrir qu’il y avait une véritable complémentarité, dans les cibles avec la voile. Le vélo a l’avantage de parler à tout le monde et il y a un événement majeur (le Tour de France), tous les ans. »
Quelles retombées économiques pour le groupe ?
« Avant que nous investissions dans le sport, nous avions un niveau de notoriété quasiment nul, proche de 2%. Normal. Aujourd’hui, 7 à 8 Français connaissent la marque. On associe régulièrement notre marque : un, à une entreprise performante. J’ai la modestie de penser que ça se vérifie par les chiffres, puisque 15 millions de Français et une entreprise sur quatre nous font confiance. Et deux, à une entreprise solidaire et proche des gens. Cela nous a aidé tout à la fois à faire connaître nos valeurs et à doper notre notoriété. Autre élément important : grâce à notre engagement et notre fidélité dans la voile (24 ans) et le vélo (19 ans), nous avons gagné la sympathie des gens, au fil des ans. Nous le vérifions notamment sur les réseaux sociaux, nous avons la plus grosse communauté vélo, en France.
Il y a également l’approche économique et la transformation que l’on peut en faire en terme de business. On ne vend rien directement pendant les épreuves, mais cela nous permet d’entretenir des liens avec des clients, des clubs d’entreprises ou des particuliers, qui nous sont fidèles. Et c’est aussi une occasion de faire des opérations auprès de prospects. Le vélo est un terrain de jeu qui s’y prête vraiment.
Un impact médiatique largement supérieur à l’investissement
Les chiffres de la saison dernière ont été évalués à un achat d’espace publicitaire, de 130 millions d’euros. En gros, c’était 10 fois plus que notre investissement. Cela repose beaucoup sur la performance sportive de l’équipe. Mais il y a un élément important, dépendant du comportement des coureurs qui portent vos couleurs et qui vous représentent au-delà de la dimension sportive : est-ce qu’ils sont disponibles avec les médias, quels discours tiennent-ils ?… Nous avons la chance d’avoir des coureurs qui sont passés par le centre de formation qui ont des niveaux Bac +4-5. Cela nous permet d’avoir, vis-à-vis des médias et du public, des sportifs avec un discours intéressant, à la fois sur l’aspect cycliste mais aussi sur des questions plus sociétales. »
Le budget et son évolution
« Le budget, cette saison est de 14 millions. Ça nous situe dans la moyenne. Les équipes qui sont dans le haut du tableau, sont à une trentaine de millions d’euros. C’est une somme significative qu’il faut quand même rentabiliser.
En 19 ans de présence dans le vélo, les investissements ont bien évidemment augmentés, mais nous n’avons jamais eu le budget des leaders. Cela n’a d’ailleurs jamais été notre objectif. Bien entendu que gagner le Tour de France serait quelque chose d’exceptionnel. Mais ce n’est pas nôtre vocation première.
Nous avons augmenté nos budgets dans des façons raisonnables et en phase avec nos moyens, en fonction des retombées mesurées ; à la fois sur le plan de l’image, de la notoriété et de tout ce que cela pouvait apporter en interne. Mais également, sur les effets bénéfiques que cela pouvait avoir commercialement. »
La structure cycliste professionnelle AG2R
« Une cinquantaine de personnes sont salariées à l’année mais en période de grands Tours qui durent trois semaines, l’effectif est à soixante-dix personnes environ. Les exigences de l’UCI ont augmenté, pour renforcer un certain nombre de dispositifs, en terme de sécurité, de contrôle, d’éthique… Il a fallu professionnaliser encore plus l’équipe, à tous les niveaux.
Nous nous appuyons beaucoup sur nôtre centre de formation, c’est aussi une bonne façon, très jeune, d’inculquer nos valeurs éthiques à nos coureurs. Actuellement, ils sont neuf dans l’effectif professionnel à être issus de ce centre. »
Quel avenir pour l’équipe AG2R La Mondiale ?
« Nous nous sommes engagés jusqu’en 2018. Nous avons voulu donner un signal fort pour conforter l’équipe et les coureurs, au moins jusqu’en 2018. Et probablement au-delà. Cela permet à Vincent Lavenu d’être en bonne position pour le recrutement, car cela renvoie l’image d’une équipe stable, aux coureurs visés. »