Samedi dans les salons du Roudourou à Guingamp, s’est réuni le gratin du football féminin national : Jean-Michel Aulas en personne pour l’OL, une délégation parisienne, la vice-présidente déléguée de la FFF, Brigitte Henriques, Arkema le sponsor titre du championnat et la direction sportive de Canal +, en tant que diffuseur de la D1 depuis la saison 2018-19 dernière. Tous venus pour la première édition du Trophée des championnes, à l’égal de celui qui existe déjà chez les garçons.
Le gratin du foot féminin à Guingamp pour le premier Trophée des championnes
L’occasion pour nous d’apprécier, avec le directeur des sports de la chaîne cryptée Thierry Cheleman, la montée en puissance de la discipline, un peu plus de deux mois après le succès d’estime, de la Coupe du monde en France. Canal a acquis les droits de diffusion du championnat domestique, depuis la saison dernière et pour cinq ans. A la hauteur de l’investissement – le plus important de l’histoire du foot féminin français -, de gros moyens sont déployés, au niveau du dispositif sur les terrains des clubs, et sur le traitement fournit aux abonnés. Le groupe audiovisuel couvre l’intégralité de la D1 Arkema et cette saison, dix matches seront proposés en direct sur Canal, contre deux l’exercice précédent.
Le pari de Canal sur le foot féminin donne de premiers résultats positifs
Thierry Cheleman le justifie par des audiences profitables, doublées d’un potentiel à exploiter large, alors que dans le sillage de Lyon et de Paris, d’autres clubs historiques chez les hommes progressent avec la volonté de devenir compétitifs. Contesté sur d’autres terrains par la concurrence, Canal a fait du football féminin sa nouvelle gageure. Le premier bilan est jugé « très bon ». Explications…
Diffuseur, sponsors, clubs et Fédération sont réunis au Roudourou, pour le premier Trophée des championnes. Avez-vous le sentiment que tous les acteurs du championnat font front commun ?
Thierry Cheleman : Bien sûr, car c’est un travail collectif. Nous ne pouvons pas réussir seul. C’est un pari que nous avons pris l’année dernière sur la D1. Et bien avant, dans le groupe en 2009, avec l’équipe de France. C’est intéressant de commencer une histoire en regardant le passé, comment on a construit le succès de l’équipe de France féminine, en 10 ans. On l’a mené avec la FFF, les médias (Direct 8 puis C8 et Canal) et avec le public. C’est exactement la même chose avec la D1, il faut que tout le monde travaille à mieux accueillir le public dans les stades, et à developper le nombre de licenciés. C’est la clé. On a besoin des clubs et les clubs de nous.
Je viens du marketing sportif, chez Havas on disait à l’époque, « il faut servir le sport, avant de s’en servir ». C’est exactement ce que nous faisons aujourd’hui avec chacun des sponsors que j’ai pu croiser à ce déjeuner. Ils montent des actions de proximité, comme Arkema qui a trente usines en France, qui s’approprient des clubs en région en leur donnant des moyens.
C’est aussi cela qui a nourri votre engagement pour la D1 française ?
Thierry Cheleman : J’ai trouvé beaucoup d’envie du côté de Canal. Un projet né d’une proposition. Quand on va voir à Canal Maxime Saada, pour lui proposer du foot féminin, il n’a pas fallu beaucoup discuter avec lui pour le convaincre. Il a dit « si on y va, on y va avec tous les moyens ». Il y a eu un appel d’offre que l’on a gagné. On a voulu une période longue pour construire. On a obtenu cinq ans. Nous verrons ensuite ce qu’il se passera, mais déjà ces cinq ans seront une étape intermédiaire avec plus de monde dans les stades, avec des équipes d’un niveau supérieur, plus homogènes et des affiches disputées. C’est la clé d’un spectacle en télé, il faut un enjeu. Des PSG – OL, c’est important. Demain, Bordeaux, Montpellier, Marseille qui remonte. J’en parlais il y a peu avec Jacques-Henri Eyraud (président de l’OM, ndlr), qui veut aussi avoir une équipe féminine forte. Quand on voit comment le PSG s’engage aujourd’hui, c’est fort. Le précédent titre s’est joué sur la fin, c’est de cela dont nous avons besoin.
Quel bilan dressez-vous de cette première saison ?
Thierry Cheleman : Il est très bon et encourageant. D’abord car certains clubs jouent dans des stades garnis. Lyon – PSG s’est disputé devant plus de 20 000 spectateurs et ils étaient 12 000 à Jean-Bouin. Ce sont des succès aussi sur les audiences : 1 million d’abonnés Canal regardent ces matchs. Quand on a 300 000 à 500 000 abonnés qui regardent un match de D1 pour la première fois, on se dit que tout est réuni. Après, il faut souffler sur cette petite flamme pour qu’elle devienne de plus en plus importante. On est en train de faire ce Trophée qui est né d’une discussion avec Noël Le Graët. Il y avait un Trophée des champions, il y en a un pour les championnes. La saison prochaine on le commencera plus tôt. Cette fois, les clubs avaient des engagements. Le spectateur a besoin de matches de très haut niveau.
Le Trophée des championnes répond-il aussi à un besoin de Canal + ?
Thierry Cheleman : C’est une épreuve au sommet, c’est une compétition et nos abonnés sont friands de matches au sommet. On a la chance cette année d’avoir le retour du foot anglais. Ils sont habitués à voir des affiches et ils adorent ça. Quand on aime le sport on cherche tous ça. C’est la meilleure promotion du football féminin.
On parle beaucoup du succès de la Coupe du monde. Comment capitaliser sur l’engouement du public pour la discipline ?
Thierry Cheleman : C’est un travail collectif. La Fédération a mis en place un dispositif important pour accompagner les clubs, les aider, recruter des joueuses, pour leur donner de meilleurs moyens, des stades dédiés pour recevoir les spectateurs dans les meilleures conditions… Ça c’est tout le travail de la Fédération. Le budget de l’OL sera la saison prochaine élevé, Jean-Michel Aulas l’a dit, à plus de 10 millions. Le naming et les sponsors qui arrivent sont très importants car ils apportent des moyens, à la fois financiers et concrets sur le terrain et des relais de communication importants. Et nous diffuseurs, nous mettons à disposition l’ensemble des moyens, nous couvrons l’intégralité de la compétition, en diffusant deux matches directeurs sur Canal + Sport et sur Canal+ Sport Week-end. Cette année, nous diffuserons 10 matches sur Canal +. Quand je disais que c’est une progression de tous les acteurs, pour nous notamment, en deuxième année, notre contribution se traduit par plus d’exposition.
En terme de dispositif, quelles sont les nouveautés ?
Thierry Cheleman : Plus de matches notamment. Et ça ne s’arrête pas au matches diffusés, c’est une vraie mobilisation de toute la rédaction. On n’a pas de journalistes spécialisés D1, Xavier (Giraudon) commente les matches, mais il peut commenter le foot anglais. Stéphane Guy commente la Ligue 1 mais il a commenté et commentera encore la D1. Tout le monde se mobilise. On retrouve de la D1 et de la Ligue 1 dans toutes nos émissions.
Peut-on imaginer à l’avenir des émissions centrées exclusivement sur le football féminin ?
Thierry Cheleman : J’ai été et je suis réticent, car je ne veux pas enfermer la D1 dans un espace de carcan de : « C’est du foot féminin, on va les mettre à part ». On a choisi comme stratégie de faire rayonner la discipline, dans l’ensemble des émissions de Canal.