Quel est le comble de celui chargé d’accroître le chiffre d’affaire de la billetterie d’un club ? Que la saison sportive se dispute à huis clos ! On plaisante, mais la question est sérieuse, posée à Mohamed Brakhlia, business developper au Paris Saint-Germain. Car c’est son rôle, que de doper l’activité « match day » au Parc des Princes, les soirs où se produisent les joueurs de Thomas Tuchel.
Par une heureuse coïncidence, un jour de covoiturage, il a mis un pied au club et d’un stage à un autre, il est devenu l’un des 600 salariés que compte le champion de France de football. Titulaire d’un MBA 2, acquis à la Sports Management School, il nous raconte quel est son job au service du club sportif le plus puissant de l’Hexagone, et comment en ce temps de confinement, il le pratique au quotidien.
Ça consiste en quoi d’être business developper au PSG ?
C’est assez simple. L’idée est de trouver de nouveaux leviers, pour développer le chiffre d’affaire du club et plus précisément, celui de la billetterie. Mon but est de trouver des clients, pour leur proposer, d’un côté les matches ponctuels, qui sont disponibles toute la saison, de l’autre les fidéliser sur des abonnements.
Vous dépendez de quel service ?
Du département billetterie/hospitalité. Nous avons deux types de services. Pour la billetterie, nous visons les structures types clubs de foot, associations, bureaux d’étudiants, pour les places les plus accessibles, sinon des comités d’entreprises. Et sur le côté hospitalités, nous nous adressons plus à des sociétés, qui vont inviter leurs clients pour du business. La différence ici, c’est qu’il y a une prestation en plus de la place au stade.
« Proposer une accessibilité au Parc à tous types de personnes »
Comment progresser quand on fait 99% de remplissage ?
Nous avons, c’est vrai, le plein de monde au stade. Le PSG est un peu le seul club en région parisienne. Il n’y a pas trop de concurrence dans le foot. 99% c’est très bien, mais il y a encore des choses à améliorer. Notamment sur l’expérience client, nous essayons de plus développer ce mécanisme pour satisfaire les personnes. J’évoquais précédemment les étudiants et les clubs, c’est essentiel de proposer une accessibilité au stade à tous types de personnes. Ils sont jeunes, ils aiment le foot, à nous de leur faire aimer le PSG.
Votre mission n’est pas seulement comptable, dictée par des objectifs chiffrées ?
Non, c’est vraiment un tout. Il y a certes le remplissage – et c’est super, il y a les recettes qui rentrent. Mais l’important, c’est de fidéliser le client, il faut que les personnes reviennent souvent au stade. On s’en aperçoit d’autant aujourd’hui, que nous sommes en confinement et la saison est terminée. Malgré cela, nous restons en contact avec nos clients pour savoir, d’abord si tout se passe bien de leur côté et comment ils vivent la situation. Sur les 47 000 places disponibles au Parc des Princes, on a 33 000 abonnés. Nous essayons de rester en contact avec eux.
Quel a été votre parcours pour en arriver là ?
J’ai intégré une école de commerce, la Sport Management School. Cela m’a permis de rencontrer pas mal de monde et de créer mon réseau. Il y a après la réalité, le sport c’est une passion, mais c’est un secteur qui reste petit et où il n’est pas facile de se faire une place. Pour en arriver là, il faut faire du bénévolat, rencontrer du monde et des opportunités se créent ensuite.
Et comment fait-on pour entrer au PSG ?
Mon histoire est assez drôle. Je suis originaire du Nord de la France, j’ai eu l’occasion de faire du covoiturage. C’est à cette occasion que j’ai croisé quelqu’un du Paris Saint-Germain, en charge des vacataires, c’est-à-dire ceux qui ne sont présents que les soirs de matches, pour accueillir et diriger les spectateurs au stade. J’ai commencé comme cela. J’ai vu plus tard une offre de stage pour être business developper. J’ai pu faire mon premier stage au PSG, durant l’année de mon Master 1. J’y suis revenu pour le Master 2. Et entre temps, je suis allé à Lorient pour voir comment fonctionne un club, à l’époque en Ligue 2. J’y suis resté trois mois.
« La moyenne d’âge des salariés du PSG est de 34 ans »
Quelle est l’ambiance dans l’entreprise ?
Je me rappelle de ma première année en stage, pour un fan de ballon, c’était magique. La majorité des salariés est jeune, la moyenne d’âge est de 34 ans. Il n’y a pas pas que des fans de foot, nous voyons pas mal de monde, chacun a sa façon de penser, nous sommes assez complémentaires. Ça se passe très bien. C’est ma troisième année, nous sommes toujours aussi motivés. Sans néanmoins occulter la pression du chiffre, qui est assez élevée. C’est normal, le PSG a l’objectif d’être l’une des marques les plus importantes au monde, dans le sport business. Pour les salariés, il faut suivre cette dynamique.
Paris a les joueurs les mieux payés du championnat de France. Qu’en est-il de ses autres salariés ?
Ça n’a bien évidemment rien de comparable avec ce que gagnent les joueurs, mais nous ne sommes pas à plaindre. Pendant cette période de confinement, certains travaillent directement dans d’autres secteurs sur place, nous, nous avons la chance d’être en télétravail.
Justement, comment se passe le confinement de votre côté ?
C’est assez flou, nous n’avons a pas vraiment d’informations de la part de l’Etat ou de la Ligue, notamment sur une reprise du football dans les stades. Nous sommes dans l’attente de directives plus claires.
Il se murmure, ça et là, que la saison prochaine pourrait se disputer à huis clos. N’est-ce pas votre pire crainte ?
Clairement. Ce serait vraiment très compliqué. J’espère que dès le mois d’août ou septembre, nous pourrons accueillir des spectateurs et repartir comme avant.
Pour vous, tourné vers la billetterie, la réussite de votre mission passe aussi par celle des joueurs sur le terrain…
Je le vois de deux manières différentes. Il y’a d’un côté le fan du PSG pour qui le résultat va être important et si l’équipe est dans une mauvaise période, on peut le ressentir vis-à-vis de lui. Mais il y a par ailleurs pas mal de sociétés qui sont là pour créer des opportunités business et inviter les clients, avec moins d’intérêt pour le score.
« Un titre de champion qui laisse un goût d’inachevé »
Suivez-vous les matches du PSG ?
J’ai appris à aimer le PSG. Je suis du Nord, à l’origine mon équipe c’était Lille. Mais en travaillant pour un club, on voit les rencontres et on commence à apprécier. A force on a même une petite pression les jours de matches.
Ce titre en Ligue 1, vous le célébrez comment ?
C’est assez bizarre, il y a un goût d’inachevé. Ça reste bien d’avoir un nouveau titre de champion. Et on attend la décision de l’UEFA pour ce qui concerne la Ligue des champions.