
Jeremy Chatonnier appréhende déjà le « sentiment de vide », qui l’accompagnera peut-être dans les mois qui suivront le vendredi 12 septembre. Car ce jour-là concrétisera sûrement l’aboutissement d’un projet né il y a quatre ans qui n’a cessé de prendre de l’ampleur, jusqu’à se formaliser.
Depuis plusieurs jours, l’association Socios Verts qu’il préside a entamé une levée de fonds, visant à réunir l’équivalent de 150 000 euros en contrepartie de parts dans l’actionnariat de l’AS Saint-Etienne, pensionnaire du championnat de France de Ligue 2.
Des socios représentés en assemblée générale d’un club de football est quelque chose d’assez fréquent hors de nos frontières, un peu moins en France (hormis à Sochaux, Guingamp, Bastia, Rouen ou Nîmes) et inédit pour un club à l’histoire et la popularité de Saint-Etienne.
Si Jeremy Chatonnier tempère les craintes (surtout celles des propriétaires de clubs qui ne voient pas toujours d’un bon oeil cet actionnariat participatif) – « Nous sommes actionnaires comme les autres », souligne-t-il -, il rappelle qu’à la fin, ce sont souvent les supporters qui trinquent et « ramassent leur club à la petite cuillère », en pensant notamment aux fans de l’AC Ajaccio, pour les derniers déçus.
« Les supporters sont un soutien », martèle celui qui bat le rappel pour fédérer le plus grand nombre de nouveaux membres à l’association (son mode d’emploi est ici détaillé). Nous en avons discuté avec lui…
Depuis quand existe l’association Socios Verts ?
Jeremy Chatonnier : Elle a été fondée en 2021, à une époque particulièrement difficile pour le football français en général, l’AS Saint-Etienne en particulier, avec la crise de la Covid et celle des droits TV.
Avec quels objectifs ?
Jeremy Chatonnier : De créer un modèle de socios, avec une participation au capital du club. A l’époque nous espérions une part de 5%.
Quelles ont été vos premières actions ?
Jeremy Chatonnier : Essentiellement du lobbying avec notre base de fans, pour infuser l’idée d’un projet de socios à la française. En cherchant l’adhésion des anciens joueurs, des collectivités et entreprises locales.
Combien étiez-vous au lancement du projet ?
Jeremy Chatonnier : Au départ nous étions une dizaine de membres fondateurs.
« Le souhait d’un actionnaire minoritaire du club de vendre ses parts »
Et aujourd’hui ?
Jeremy Chatonnier : Nous allons bientôt dépasser les 3 000 membres (2 800 ce jour, ndlr), avec notre toute première levée de fonds. Sachant que chaque donateur devient un membre de l’association.
Qu’est-ce qui explique l’accélération soudaine du projet ?
Jeremy Chatonnier : Le souhait d’un actionnaire minoritaire du club de vendre ses parts. L’opportunité nous a été donnée, avec l’assentiment du conseil d’administration de l’ASSE.
Quel pourcentage du capital cela représente-t-il ?
Jeremy Chatonnier : Un peu moins de 0,1%.
Que souhaitez-vous en faire ?
Jeremy Chatonnier : Déjà, d’avoir un représentant à l’assemblée générale. Nous nous présentons en porteurs de projets, celui de toute une communauté. Nous voulons dire à nos adhérents qu’ils ont l’opportunité d’entrer dans l’actionnariat de l’AS Saint-Etienne, qu’elle est unique et qu’elle doit les rendre fiers. Ces abonnés viennent de partout en France, ils sont le signe d’un engouement exceptionnel.
Combien vous faut-il pour racheter ces parts ?
Jeremy Chatonnier : Il nous faut lever 150 000 euros.
Et à combien en êtes-vous ?
Jeremy Chatonnier : A plus de 90 000 euros ce jour (ce mardi 26 août, ndlr).
« Les socios de Bastia ont largement contribué au redressement du club »
Pensez-vous pouvoir y parvenir d’ici à l’échéance du 12 septembre (date butoir statutaire pour le rachat des actions) ?
Jeremy Chatonnier : Oui, je le pense. Mais il faut pour cela, que tout le monde comprenne bien le sens de la démarche. Car c’est un modèle qui est naissant, cela requiert une totale transparence de nos actions. A chaque membre sera envoyé un mail récapitulatif, autant de fois qu’il le faudra pour passer le message. Nous ne voulons pas décevoir les membres.
Avez-vous un exemple de projet du même genre qui vous inspire ?
Jeremy Chatonnier : Il en existe beaucoup, des modèles en Allemagne, ou au Royaume-Uni. En France, on peut parler des socios de Bastia, qui ont largement contribué au redressement du club, à la construction du centre de formation, aux projets autour du stade… Ils participent à la culture du club, qu’ils ont contribué à sauver. A Saint-Etienne, le contexte est évidemment différent, avec un actionnaire majoritaire fort, mais les sujets restent sensiblement proches.
Justement le propriétaire du club, vous a-t-il rencontrés. Et comment envisage-t-il votre arrivée ?
Jeremy Chatonnier : Jusqu’ici, nous n’avons eu d’échanges qu’avec la direction. Je pense qu’ils attendent de voir avant de se positionner.